La magie est très pratiquée dans le monde arabe. Au Maroc, tout particulièrement

C’est par magie que naquit l’une des grandes dynasties qui règnent dans le monde arabe et le monde en général. La dynastie des Anaouites.

On raconte ainsi l’histoire d’un roi qui se désolait de ne pas avoir d’héritier. Il avait beau prier le Très-Haut et sacrifier des coqs noirs censés éloigner le mauvais sort, le ventre des femmes de son harem restait désespérément plat. Il ne confiait son chagrin qu’à un âne de la Cour pour qui il s’était épris d’un amour sincère et loyal. Quand vint le moment fatidique, le bon sultan, allongé sur son lit de mort, demanda à voir son animal préféré, son ami et confident, et à rester seul avec lui. On lui amena l’âne et on les laissa en tête à tête. Le roi étreignit la bête, serra fortement sa tête dans ses bras et commença à pleurer à chaudes larmes en se lamentant sur son sort.

— Vois-tu, mon ami, je vais partir et laisser un trône vide. Dieu m’a abandonné. Il a certainement voulu me punir. Pourtant, wallah, je n’ai rien fait de mal. En tout cas, pas plus qu’il n’est recommandé de faire. Ô mon ami, toi seul peux m’écouter et me comprendre. Je veux me confier à toi puisque Dieu m’a laissé tomber. Tu m’es plus cher que lui.

L’âne n’émit aucun son. C’était signe de consentement. Il consentait, dans sa grande béatitude, à écouter le roi agonisant. Et le roi parla. Il parlait et pleurait, puisant dans ses dernières ressources d’énergie. Ses larmes coulaient sur le museau de l’âne qui en fut très vite complètement inondé. Le roi moribond le sentit. Il en fut ému.

— Oh ! mais tu pleures toi aussi, ô ami fidèle.

Il enserra la bête plus fortement encore et posa ses lèvres sur son poil humide. Et le miracle se produisit. L’âne se transforma aussitôt en un jeune homme. La légende dit qu’il était très beau, encore plus beau que les princes sur la page de couverture de Paris-Match. Le cœur du roi fut tellement ébloui qu’il s’arrêta de battre pour contempler ce visage merveilleux. C’est ainsi que le malheureux sultan rendit l’âme dans les bras du beau prince qui fut aussitôt acclamé souverain du pays et installé sur le trône sous le nom de Abou Riko Ier.

C’est ce jour-là que naquit l’une des dynasties les plus prestigieuses du monde, la dynastie des Anaouites. La légende prenait fin, l’Histoire commençait. On dit que tous ceux que le jeune roi embrassait perdaient l’usage de la parole et ne communiquaient plus que par braiement. Aussi, pour faire plaisir à son roi, le gouvernement introduisit l’apprentissage du braiment dans les écoles et les universités et bientôt tout le peuple se mit à braire dans la joie et le bonheur, en parfaite symbiose avec son souverain bien-aimé.

Il continua à braire à en perdre sa langue maternelle. Son identité et sa conscience.

De cette légende, l’Histoire retiendra surtout que pour assurer la continuité et la pérennité d’une royauté, il est plus censé de se fier à un âne qu’à Dieu…